P. Kurmann: La cathédrale Saint-Nicolas

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Titel
La cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg: miroir du gothique européen.


Herausgeber
Kurmann, Peter
Erschienen
Lausanne 2007: La bibliothèque des Arts
Anzahl Seiten
254 S.
Preis
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Rezensiert für infoclio.ch und H-Soz-Kult von:
Prisca Lehmann

«Tenue en haute estime et pourtant méconnue» (p. 7). La cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg, important témoin culturel et artistique de cette ville, attendait sa première monographie pour présenter les différentes tendances architecturales et de décor qui composent cet édifice dès le XIIIe siècle. Abouti en 2007, ce projet a été soutenu par la fondation pour la conservation de la cathédrale dans le but de proposer «un ouvrage de référence destiné aussi bien à un large public qu’au monde des initiés» (p. 5), disponible aussi en langue allemande: Peter Kurmann (éd.), Die Kathedrale St. Nikolaus in Freiburg: Brennspiegel der europäischen Gotik, Lausanne: La Bibliothèque des Arts; Fribourg: Stiftung für die Erhaltung der Kathedrale St. Nikolaus, 2007, 255 p. Le volume a été réalisé sous la direction scientifique de Peter Kurmann (professeur à l’Université de Fribourg, chaire d’histoire de l’artmédiéval) avec la collaboration de treize spécialistes: historiens, historiens de l’art et musicologues.

La construction de Saint-Nicolas s’est déroulée sur deux siècles, entre 1283 et 1490. L’édifice a été conçu à l’origine comme une église paroissiale, et elle acquerra le statut de cathédrale seulement en 1924. Bien que le style gothique prédomine à Fribourg, en l’absence d’une monographie qui traite de l’ensemble de la cathédrale, d’autres époques ont aussi été étudiées dans cet ouvrage, notamment des oeuvres d’art très importantes qui ontmarqué la mémoire de ce lieu comme les vitraux du polonais Józef Mehoffer créés entre 1895 et 1936. La cathédrale nous est ainsi présentée sur une longue période et sous tous ses aspects; en effet, bien qu’il n’ait heureusement pas subi de destructions ou de rénovations importantes, ce monument à l’aspect résolument gothique porte l’empreinte de chaque époque.

Le volume est subdivisé en six grandes parties thématiques. Il s’ouvre par une section consacrée au cadre historique, afin de rendre compte des enjeux politiques, religieux et culturels qui ont caractérisé la construction de la cathédrale et ses changements successifs. Un vaste regard chronologique nous est proposé: de l’origine de l’église Saint-Nicolas exposée par Hans-Joachim Schmidt (pp. 14-29), aux trois siècles (de 1530 à 1803) caractérisés par la Confessionnalisation, les Lumières et la Révolution illustrés par Volker Reinhardt (pp. 30- 36), pour conclure avec une étude de Francis Python (pp. 37-41) sur la genèse d’une «République chrétienne» au XIXe siècle. L’église estmentionnée pour la première fois – comme église paroissiale – dans un document de 1177/1178, puis elle a été consacrée en 1183 par l’évêque de Lausanne Roger de Vico Pisano, élevée au rang de collégiale par le pape Jules II en 1512 et, enfin, seulement en 1924, à celui de cathédrale. Elle est dédiée à saint Nicolas, protecteur des mariniers et des commerçants, un saint typiquement urbain.

La deuxième partie est introduite par une contribution de Stephan Gasser (pp. 42-56) qui offre une description minutieuse de l’architecture générale de l’édifice – église paroissiale conçue sur le modèle d’une cathédrale dont la construction a été vraisemblablement commencée en 1283 – et de l’histoire de sa construction, en particulier des raisons qui ont poussé les bourgeois de Fribourg à entreprendre l’édification d’une nouvelle église. Elle propose en outre une chronologie relative de l’édifice et le compare au contexte architectural de la Suisse occidentale. Ensuite, Marc Carel Schurr (pp. 57-64) retrace l’histoire de la tour grâce aux comptes détaillés relatifs au chantier rouvert de 1470 jusqu’à 1490 et de la chapelle du Saint-Sépulcre fondée par Jean Mossu (dont on connaît le testament datant de 1432), ainsi que l’architecture de la cathédrale dans le contexte européen – en particulier la Haute-Rhénanie, la cathédrale de Strasbourg, Prague et les Parler (pp. 91-108). Enfin, Peter Kurmann (p. 102-109) dévoile un des chefs-d’oeuvre du gothique flamboyant européen et ses modèles: la tour (d’une hauteur de 80 m) achevée en 1490 et complètement construite en pierre. Il présente en outre l’évolution architecturale de la cathédrale du «gothique des temps modernes» (XVIIe-XVIIIe siècles) au néogothique du XIXe siècle (pp. 109-120).

La sculpture monumentale constitue le troisième volet de la monographie. Stephan Gasser (pp. 121-128) étudie en détail l’histoire, le style et le programme iconographique du portail sud – appelé aussi dès le Moyen Âge «porte du dimanche» – érigé vers 1340. Le portail du Jugement dernier – à l’entrée principale dans le porche de la tour occidentale – qui date de 1380 environ et le groupe de la Mise au tombeau du Christ, une oeuvre d’importance européenne réalisée dans les années 1430 et mentionnée pour la première fois dans une source de 1442, sont analysés par Peter Kurmann (pp. 129-157).

La quatrième partie traite des vitraux de la cathédrale et s’ouvre avec une introduction générale de Brigitte Kurmann-Schwarz (pp. 158-161). Suivent les contributions d’Uta Bergmann (pp. 162-165) sur les vestiges des vitraux du Moyen Âge aux temps modernes et sur ceux de Carignan réalisés entre la fin du XVe et le milieu du XVIe siècle (placés à Saint-Nicolas en 1876), deValérie Sauterel (pp. 166-180) sur les vitraux de Josef Mehoffer (exécutés entre 1895 et 1936) et de Brigitte Kurmann-Schwarz (pp. 181-188) sur ceux d’Alfred Manessier achevés entre 1974 et 1988.

L’église Saint-Nicolas conserve une part importante de son mobilier liturgique datant du Moyen Âge. Cet aspect est pris en compte par Peter Kurmann (pp. 189-193) dans le chapitre sur les restes de l’installation liturgique médiévale, en particulier du groupe de la Crucifixion (années 1430) ; sur la grille du choeur commandée à Richard Wagner de Munich (forgée entre 1464 et 1466) ; sur les fonts baptismaux réalisés en 1498- 1499 par Hermann et Gylian Ätterli et sur la chaire sculptée dans les années 1513-1515 par un maître zurichois prénommé Hans. Le volume propose en outre un article de Brigitte Kurmann-Schwarz et Stephan Gasser (pp. 194-200) sur les stalles gothiques appartenant au groupe dit des «stalles savoyardes», exécutées sous la direction d’Antoine de Peney entre 1462 et 1465. Brigitte Kurmann-Schwarz (pp. 201-204) présente aussi la peinture de la voûte de la chapelle du Saint-Sépulcre qu’elle met en relation avec le vitrail des Dix-Mille- Martyrs du choeur de l’ancienne collégiale de Berne réalisé vers 1450 par les verriers bâlois de la famille Glaser. Peter Kurmann (pp. 205-208) étudie – d’après divers inventaires – les autels baroques et néogothiques qui étaient au nombre de 17 dans la nef, au milieu du XVIIIe siècle, et ont été réduits à 13 à la suite de mesures prises en 1748 afin de régulariser la liturgie. L’historien de l’art fournit aussi une présentation de quelques objets liturgiques appartenant au trésor de l’église (pp. 209-211): un bras reliquaire de saint Nicolas (peu après 1514), une crosse prévôtale du XVe siècle, un baiser de paix (XIVe siècle) et un chandelier pascal transformable en chandelier des ténèbres du XVe siècle.

La dernière partie de la monographie est consacrée à la musique. MatthiasWalter (pp. 212-215) présente les treize cloches qui se trouvent à la cathédrale et datant de cinq siècles différents (du XIVe au XVIIIe siècle); elles sont abritées dans la tour occidentale et la flèche du choeur de Saint-Nicolas. François Seydoux (pp. 216- 1228) propose une histoire des orgues, depuis celui de Sebald Manderscheidt de 1657 et d’Aloys Mooser (1834) – réaménagé par Louis Kyburz (1859-1863) –, à sa restauration/reconstruction entre 1974 et 1982 par Neidhart & Lhôte.

Cet ouvrage est enrichi par une bibliographie exhaustive, un glossaire utile et un index des personnes et des lieux. Les nombreuses illustrations sont également remarquables, dont celles du photographe Yves Eigenmann. Seul regret, notamment pour la partie historique, le choix éditorial de ne pas avoir de notes limite les références à quelques ouvrages fondamentaux et ne permet pas de renvois aux sources.

Citation:
Prisca Lehmann: compte rendu de: Peter Kurmann (dir.), La cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg: miroir du gothique européen, Fribourg: Fondation pour la conservation de la cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg, Lausanne, Bibliothèque des Arts, 2007, 254 p. Première publications dans: Revue historique vaudoise, tome 117, 2009, p.284-286.

Redaktion
Veröffentlicht am
22.03.2010
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Die Rezension ist hervorgegangen aus der Kooperation mit infoclio.ch (Redaktionelle Betreuung: Eliane Kurmann und Philippe Rogger). http://www.infoclio.ch/
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